Le CNRFP a organisé le mercredi 04 avril 2018, une animation scientifique. La présentation du Dr Lamoussa OUATTARA a porté sur des travaux de recherche effectués au CNRFP.
C’est en prélude à la soutenance de thèse de doctorat que M. Lamoussa Paul OUATTARA est passé présenter les résultats de ses travaux de recherche effectués dans le cadre du projet ANTIMAL au sein du CNRFP.
L’exposé a porté sur le thème : "étude phytochimique bio guidée pour l’identification de molécules à activité antiplasmodiale in vitro à partir de plantes médicinales de la région des cascades au Burkina Faso". Autrement dit, il s’agissait d’investiguer de nouvelles sources de molécules antiplasmodiales efficaces contre le Plasmodium falciparum à travers les plantes utilisées par les tradithérapeutes de la région des Cascades au Burkina Faso.
L’échantillon de base a concerné 13 plantes sélectionnées sur 21 et les conclusions des travaux ont montré que trois (3) plantes étaient efficaces dans la lutte contre le paludisme. La substance responsable de l’activité contre le parasite du paludisme a été identifiée dans une plante le Terminalia avicennioides ou "faux karité" comme étant l’acide ellagique.
RESUME SCIENTIFIQUE
Thème : "étude phytochimique bio guidée pour l’identification de molécules à activité antiplasmodiale in vitro à partir de plantes médicinales de la région des cascades au Burkina Faso"
Introduction : Le paludisme demeure de nos jours un problème de santé publique dû à une émergence de la résistance du Plasmodium falciparum aux médicaments antipaludiques. Il y a donc une nécessité d’investiguer de nouvelles sources de molécules antiplasmodiales efficaces contre le Plasmodium falciparum. Une des sources potentielles de molécules antiplasmodiales sont les plantes.
Objectifs :
- Mener une enquête ethnobotanique auprès des tradithérapeutes de la région des Cascades,
- Analyser l’activité antiplasmodiale des principales plantes retenues à l’issue de l’enquête ethnobotanique,
- Procéder au fractionnement bioguidé des extraits de plantes ayant une bonne activité antiplasmodiale,
- Déterminer l’activité antioxydante des fractions actives contre le Plasmodium falciparum
- Isoler les constituants chimiques responsables de l’activité antiplasmodiale
Matériel et méthodes : une enquête ethnobotanique menée auprès des tradithérapeutes de santé a permis de sélectionner 13 plantes. Les extraits bruts et alcaloïdiques de ces plantes ont été soumis au criblage préliminaire de l’activité antiplasmodiale qui a été réalisée par les techniques de la pLDH et le Sybr green I. Les extraits ont été soumis au fractionnement bioguidé en évaluant leurs activités antiplasmodiale et cytotoxique in vitro sur la souche K1 résistante à la chloroquine, la pyréméthamine et la proguanil et sur les cellules HepG2 et CHO en utilisant la technique du bromure de 3-[4,5-diméthylthiazol-2-yl]-2,5-diphényltétrazolium (MTT) afin de calculer l’index de sélectivité (IS). L’activité antioxydante a été évaluée en utilisant les méthodes de la DPPH, ABTS et FRAP. Les méthodes chromatographiques et de spectrométrie de masse et de résonance magnétique nucléaire ont permis de déterminer les structures des molécules isolés.
Résultats : Au total, 21 plantes ont été recensées et 13 plantes ont été sélectionnées à l’issue des enquêtes ethnobotaniques après une revue de la littérature scientifique.. Les extraits de 6 plantes ont présenté une bonne activité antiplasmodiale par la première technique de la pLDH. Parmi ces 6 plantes, les extraits de Terminalia avicennioides, Combretum collinum et Ficus capreaefolia étaient prometteurs et ont présenté des concentrations inhibitrices de CI50 ≤ 5 µg/ml pour plusieurs extraits.
La deuxième technique du Sybr green I a été utilisée pour analyser 31 extraits bruts des 6 plantes issues de l’enquête et les 2 plantes (Pavetta crassipes et Zanthoxylum zanthoxyloides) issues de nos études antérieures.
Six (6) extraits bruts ont présenté une très bonne activité (CI50 ≤ 5 µg/ml), six (6) ont présenté une activité modérée (5 < CI50 ≤ 10 µg/ml) et les autres extraits bruts ont présenté des CI50 > 10 µg/ml. Les extraits les plus actifs ont été les extraits alcaloïdiques et dichlorométhane des feuilles de Combretum fragrans (CI50 = 3 μg/ml, CI50 = 5 μg/ml), des feuilles de Combretum collinum (CI50 = 4 μg/ml), et de l’extrait MeOH/H2O des feuilles de Terminalia avicennioides (CI50 = 3,5 μg/ml). Les extraits qui ont démontré une activité modérée sont les extraits méthanoliques de Terminalia avicennioides (CI50 = 6,5 μg/ml) de Combretum fragrans (9 μg/ml) et les extraits alcaloïdes totaux de Acacia kirkii (10 μg/ml). Les extraits actifs ont montré une faible cytotoxicité sur les 2 cellules testées. Les concentrations cytotoxiques 50 % étaient supérieures à 12,5 ce qui correspond à un index de sélectivité variant entre 2 et 28.
Le fractionnement bioguidé de l’extrait MeOH/H2O de Terminalia avicennioides a permis de trouver une meilleure activité antiplasmodiale avec une CI50 = 3,5 µg/ml. L’extrait MeOH/H2O (80 : 20 v/v) de Terminalia avicennioides a été soumis à une extraction successive liquide/liquide avec l’acétate d’éthyle et le n-butanol. Les extraits acétate d’éthyle (AcOEt), butanoliques (BuOH) et extraits aqueux obtenus ont été testés. La fraction acétate d’éthyle a présenté la meilleure activité antiplasmodiale (7 µg/ml) et le composé responsable de l’activité antiplasmodiale a été isolé et identifié comme l’acide ellagique (CI50 = 0,2 µM, IS = 152) par un fractionnement bioguidé. Les fractions AcOEt et BuOH et aqueuse de Terminalia avicennioides et l’acide ellagique isolé avaient une bonne activité antioxydante.
Conclusion : Nos résultats confirment l’importance de l’investigation des plantes de la médecine traditionnelle comme sources de molécules antiplasmodiales. Les extraits et principes actifs de Combretum fragrans, Combretum collinum et Terminalia avicennioides de la famille des Combretaceae ont présenté une bonne activité antiplasmodiale et une bonne sélectivité. Ces plantes sont de meilleurs candidats pour les prochaines investigations afin d’isoler des molécules responsables de l’activité antiplasmodiale.
Mots clés :
Plasmodium falciparum, Phytochimie, activité antiplasmodiale, Combretum fragrans, Combretum collinum, Terminalia avicennioides, Combretaceae, acide ellagique.